L’éco-anxiété met à rude épreuve les relations humaines. Voici quelques conseils de base pour soutenir vos proches éco-anxieux et vous éviter l’épuisement émotionnel.
Vous écoutez les nouvelles du matin, parcourez votre fil Twitter ou Facebook, et voilà qu’un frisson vous parcourt l’échine. Votre fréquence cardiaque grimpe, alors que vous lisez les titres d’articles alarmants. Vous avez beau essayer de vous concentrer sur votre travail, impossible : vous êtes distrait, préoccupé. Vous sentez l’ulcère qui pointe. Votre partenaire ou votre coloc vous reproche d’être irritable et hyper-sensible. Vous n’arrivez pas à décrocher des fils d’infos. « Tout empire de jour en jour. Que va-t-il se passer demain ?« . Souvent, vous avez du mal à respirer. Surtout quant vous vous demandez : « où sera-t-on dans 5 ans ? » ou « que vont devenir les enfants ?«
Stop ! Inspirez. Tout va bien. Vous venez de passer quelques secondes dans le cerveau d’un éco-anxieux. Ça vous rappelle quelqu’un avec qui vous vivez ? Si oui, vous êtes au bon endroit.
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L’éco-anxiété n’a rien d’une lubie
La hausse des températures, les canicules et les tempêtes, la disparition de la biodiversité, le pouvoir des lobbies, le COVID-19… nous avons tous des raisons concrètes d’être inquiet.e.s. Mais, chez l’éco-anxieux, cette inquiétude est décuplée, jusqu’à devenir un véritable handicap.
Pour comprendre ce que ressentent les éco-anxieux, il faut (re)voir le film Take Shelter, de Jeff Nichols (2011). Le pitch : Curtis, l’anti-héro de ce drame, est obsédé par de violents cauchemars sur la fin du monde. Alors que la peur s’empare de lui, il se construit un bunker sous-terrain.
L’éco-anxiété n’a rien d’un fantasme : c’est une pathologie psychologique qui désigne un « sentiment de bouleversement et de désespoir face au dérèglement climatique ». On vous l’assure : vivre dans le stress permanent et subir des attaques de panique quotidiennes n’a rien de plaisant. Mais, heureusement, vous pouvez aider vos proches. Voici comment.
Avertissement : ce court article ne vise aucunement à remplacer l’aide d’un professionnel – loin de là ! Et si vous, ou un de vos proches, souffrez d’éco-anxiété au point où cela devenait difficilement supportable, contactez votre médecin !
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Le cercle vicieux de l’anxiété
Les neuroscientifiques définissent l’anxiété (en général) comme la rencontre de l’inquiétude et du stress.
L’inquiétude est une préoccupation (mentale ou émotionnelle) à propos de quelque chose. C’est un truc intellectuel. Au contraire, le stress est un truc hormonal et instinctif.
L’inquiétude déclenche le stress, qui nourrit… l’inquiétude. Bref, l’anxiété est un cercle vicieux dont il est difficile de sortir.
Reconnaître un éco-anxieux
Inutile d’aller chercher des listes de symptômes sur Google. Fiez-vous plutôt à votre bon sens : la personne est nerveuse, agitée, elle se sent en danger, a des difficultés à se concentrer voire à respirer. Bref, soyez attentif.
Ne juger pas : écoutez
L’éco-anxieux souffre. Il/elle a souvent besoin d’extérioriser son angoisse. Le simple fait de l’écouter peut grandement l’apaiser. D’abord, parler libère une partie de l’énergie qui bouillonne en lui/elle. Ensuite, dire les choses à haute voix aide souvent à mettre le doigt sur ce qui ne va pas. Ne cherchez pas à trouver des solutions à tout prix. Écouter suffit.
Relativisez
Les éco-anxieux ne sont pas des paranos. Ils aiment les chiffres, les stats, les projections… La science pourra les aider. Demandez-vous ensemble : « le risque que tel truc arrive est-il démontré ? » (vous pouvez vous aider d’internet pour trouver des données). Ce genre de test de réalité peut permettre de relativiser des peurs et d’aller de l’avant.
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Vous êtes un aidant, pas un thérapeute
Attention, n’en faites pas trop : vous n’êtes pas un thérapeute qualifié. Et même si vous l’étiez, il est déconseillé de s’occuper de son conjoint ou de ses enfants.
En tant qu’aidant, il est aussi de votre devoir de prendre soin de vous. Prenez du temps pour vous, pour sortir seul et vous vider la tête.
Si, un jour, votre instinct vous dit : « c’est trop pour moi », c’est que vous avez probablement raison. Faites-vous aider par un pro, d’autant plus qu’après la crise du COVID, beaucoup de praticiens proposent des rendez-vous à distance.
Tenir un journal de bord (du précipice)
Un truc que beaucoup de thérapeutes recommandent est de tenir un journal dans lequel, chaque jour, la personne anxieuse répondra à la question « est-ce que je vais bien aujourd’hui ?« , en un court paragraphe. Une manière pour lui de se rendre compte qu’il se sent plus souvent bien qu’il ne le pense.
Allez, courage ! Et n’oubliez pas : les éco-anxieux sont des gens normaux dans un monde malade !
À lire : on a feuilleté pour vous Comment rester écolo sans finir dépressif (Editions Tana), de la journaliste Laure Noualhat, qui a réalisé le documentaire « Après-Demain » avec Cyril Dion. Elle y décrit le sentiment d’impuissance qui gagne beaucoup d’écolos – et de collapsos ! – face à l’immobilisme de la société, malgré l’urgence écologique. La force du livre : apporter des solutions pour transformer cette « éco-lassitude » en volonté d’action. C’est l’histoire d’une journaliste spécialisée dans les questions d’environnement, qui finit par frôler l’éco-anxiété à force de lire des mauvaises nouvelles à longueur de journée. Elle se tourna alors vers des éco-psychologues – comme Charline Schmerber – pour parler solastalgie, burn out écolo, écoflip. Ils lui expliquent la nécessité de « faire le deuil du monde d’avant » et de notre mode de vie et lui ont donné des trucs et astuces pour réaliser cette « grande transition intérieure ». Un deuil nécessaire pour trouver la créativité nécessaire à l’invention du monde d’après.