Comment gagner la bataille des imaginaires, mère de toutes les batailles ?

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Photo Cindy Jeannon

La vision techno-capitaliste affiche une domination écrasante. Pourtant, la “bataille des imaginaires” peut être gagnée.

On ne résout pas un problème avec le mode de pensée qui l’a créé” disait Einstein. Tant qu’un imaginaire colonisé par l’American Way Of Life des années 1950 présidera aux destinées du monde, celui-ci sera condamné à l’effondrement.

Mais comment mener (et gagner) la “bataille des imaginaires” ?

Pour info, la formule n’est pas de moi, mais de Richard Dawkins.

D’abord, comme le professait Pierre Bourdieu dans La sociologie est un sport de combat, il s’agit de “comprendre pour combattre”.

De tous les récits sociaux, c’est toujours celui qui pointe vers un avenir meilleur qui remporte la mise.

À ce petit jeu, la méga-machine techno-capitaliste gagne toujours.

Elle seule peut apporter une réponse réconfortante à chacune de nos peurs : “vous n’aurez ni faim, ni soif, ni froid, ni mal et vous ne mourrez plus“. Si le diable pouvait écrire un contrat, il ferait un copier-coller de l’american dream cornucopien transhumaniste. Face aux promesses mirifiques de ce mode de vie, son caractère délétère ne compte plus. Comme l’écrivait Guy Debord en 1988 : “il vaut mieux ne plus trop savoir penser, mais être au contraire assez bien exercé au savoir spectaculaire“.

En face, le futur soutenable des écolos paraît mortellement “raisonnable”. Et si peu spectaculaire. Mou. Chiant, comme le discours moralisateur d’une mère.

Lire aussi : Après moi le déluge ! Ou comment réensemencer nos récits

L’imaginaire consumériste maintient la population dans une adulescence irresponsable. Tandis que l’imaginaire écolo appelle à la responsabilité et à la maîtrise de soi.

Or, les neurologues, comme Antonio Damasio de l’université de Californie du Sud, ont montré que, dans le cerveau humain, notre “raison” se nourrissait de nos “émotions”. Voilà pourquoi il est si facile de concevoir des applications digitales qui prennent le contrôle de nos vies (lire ici pour en savoir plus). Voilà pourquoi l’humain semble incapable de penser sa vie au-delà du cercle de ses proches et d’un futur immédiat.

Agir pour le bien n’est pas une question d’agir rationnel, mais une question de motivation “émotionnelle”, associée à des “passions” tristes ou joyeuses.

De plus, les sociologues comme Marie-Chantal Doucet ont démontré que “les sermons” ont beaucoup moins d’impact que les contraintes physiques. Un exemple : pour faire maigrir un obèse morbide, rééduquer son alimentation ne suffit pas. Mieux vaut y associer la pose d’un anneau gastrique.

Bref, “les récits n’ont pas de pouvoir causal. Ils se construisent après l’action“, (Alessandro Pignocchi). Mais les émotions et les contraintes, elles, provoquent l’action.

Autre problème : l’inégalité des moyens

Les cornucopiens n’ont pas de limite : à leurs yeux, la fin (l’enrichissement) justifie tous les moyens.

Peut-il en être de même pour l’écologie ? XR doit-il faire des reels sur Instagram ? Que penser de l’« hélicologiste » de Yann-Arthus Bertrand ? Et jusqu’où peut-on aller au nom de l’écologie ? Boycott pacifiste ? Sabotage désobéissant ? Violence armée ?

Les industriels mentent. Les écolos s’épuisent à débunker leurs mensonges.

L’écologie ne pourra jamais lutter contre les imaginaires simplistes du techno-solutionnisme.

Enfin, “les messages sur les éco gestes on en reçoit 2/3 fois par jour, des messages de publicités on en reçoit entre 400 et 3000” (source).

Comment rivaliser face à ce matraquage quotidien ?

La bataille des imaginaires serait-elle perdue d’avance ?

En 1870, l’idéologie industrialiste organise la confusion entre progrès technique et progrès humain. Depuis, nul retour en arrière ne semble possible.

Partout, le techno-progressisme s’impose.

Et, à partir de cet imaginaire, la perspective de vivre en émettant deux tonnes d’équivalent CO2 par an et personne, c’est vivre comme un Amish.

Dans ces conditions, le rapport de force sera toujours au désavantage de l’écologiste.

Prêcher par l’exemple : l’arme absolue

Vous vous demandez probablement : si le système est partout, comment en sortir ? Le changement de quelques-uns peut-il détruire un système ? Si le consumérisme est un blob qui absorbe tout, dissidences comprises, est-il utile de fonder un éco-hameau permacole ? Si le techno-capitalisme contrôle les règles du jeu, est-il utile d’adopter un mode de vie low-tech ?

La réponse est OUI. Trois fois oui.

C’est par la construction d’utopies concrètes que l’écologie pourra prêcher par l’exemple qu’un autre mode de vie est possible et agréable.

C’est par l’organisation de systèmes alternatifs – parallèles ? – opérationnels et efficaces, que l’on fait sauter les verrous, les peurs de “retour au Moyen Âge”.

Un film comme Demain, de Cyril Dion, fait 1 million d’entrées (source), soit autant que le film Ad Astra qui envoie Brad Pitt dans les étoiles (source).

Voilà pourquoi je crois que la victoire réside dans la concrétisation des imaginaires écologistes et dans la mise en valeur de ces initiatives. Voilà pourquoi je participe à ce magazine en ligne, et pourquoi j’ai fondé le Low-Tech Journal.

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