Lutter contre la canicule en ville est le défi des architectes-urbanistes de demain. Bonne nouvelle, c’est tout à fait possible grâce à quelques actions pratiques et peu coûteuses.
Selon Météo-France, nous allons affronter 2 fois plus de vagues de canicule d’ici 2050. Or, pour beaucoup d’urbains, la moindre caniculette tourne vite à l’épreuve.
Pourtant, rafraîchir sa ville de manière naturelle est à la portée de toutes les Mairies.
Mais, attention aux fausses-bonnes idées que les industriels auront vite fait de nous vendre comme des solutions miracles !
À vous d’en parler dès maintenant à votre Maire, histoire qu’il soit aware !
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Sources
Pour réaliser cet article, je me suis basé sur un guide publié par l’ADEME. Je vous invite à télécharger ce guide de 19 propositions (dont la moitié sont bidon, attention). J’ai aussi lu ce livret rédigé par France Nature Environnement pour la ville de Lyon. Une lecture rafraîchissante !
Pourquoi fait-il plus chaud en ville qu’à la campagne ? C’est à cause de la “surchauffe urbaine” due à l’effet d’îlot de chaleur. Voici un graphique pour tout vous expliquer.
Les bonnes idées
1-Végétalisation de la voirie : débétonnez !
La principale solution verte pour réduire l’effet de surchauffe urbaine est la végétalisation.
Contre la canicule en ville, l’ADEME recommande de créer des parcs qui “constituent de réels îlots de fraîcheur”, avec leurs pelouses et leurs arbres.
D’ailleurs, plus on plante d’arbres denses, moins le soleil cogne sur l’asphalte. Le must étant de planter des arbres fruitiers denses, comme des cerisiers, des néfliers, des sorbiers (leur fruit nourrit les oiseaux), des acacias (très utiles aux abeilles).
Mais, si on a pas la place pour créer un parc, la méthode consiste à débétonner pour remplacer un espace (rond point, partie de trottoir) par une zone enherbée.
Et si on a pas le temps ou les moyens de faire pousser et entretenir des arbres, on peut démarrer par la construction de “structures d’ombrage” qui limitent le rayonnement direct du soleil sur le sol et permettent de s’abriter. C’est toujours ça de pris.
2-Arrosage des rues : efficace et pas cher !
Une solution low-tech et efficace consiste dans l’arrosage de l’espace urbain le soir, avec de l’eau de récupération (cela demande d’investir dans des cuves et des pompes locales). Le soir, la ville serait rafraîchie par évaporation de l’eau déversée.
3-Action sur les comportements personnels : la solution, c’est vous !
Les mesures les plus efficaces touchent à l’isolation des bâtiments et à la réduction du trafic des véhicules thermiques en centre ville.
Bref, il faut subventionner l’isolation des immeubles (mode de gestion passive de la canicule en ville) plutôt que d’installer de climatisation (qui refroidit l’intérieur et réchauffe l’extérieur). Mais aussi aider le passage à des modes de déplacement sobres (marche, transports publics, vélo).
Le petit plus : sur internet, vous trouverez plein d’articles lifestyle qui vous recommandent de fermer les volets le jour, d’ouvrir les fenêtres la nuit ou encore de placer un drap mouillé sur le sol de sa maison, etc… Ce sont de bonnes idées, mais je ne vais pas m’attarder dessus.
Les fausses-bonnes-idées contre la canicule en ville
Depuis quelques années, les industriels mènent un lobbying intensif auprès des mairies, afin qu’elles investissent dans des solutions aussi coûteuses qu’inutiles. En voici quelques-unes.
Lire aussi : Géo-ingénierie, les marchands de climat vont-ils réussir la bidouille du siècle ?
1-Les toitures et façades végétales
Certes, la collectivité peut modifier ses plans d’urbanismes pour demander à végétaliser les nouvelles constructions. Mais on ne change pas le Plan Local d’Urbanisme comme ça !
On peut aussi envisager de végétaliser des toits et façades des immeubles existants, notamment les bâtiments publics du coin. Mais ces investissements, souvent conséquents, auront toujours un impact assez limité !
2-La création de plans d’eau
Hmmm… je crains que ce ne soit le paradis des moustiques et que les riverains se plaignent ! Bien sûr, les habitants – et surtout leurs enfants – adorent les fontaines et jets d’eau.
Malheureusement, les pénuries d’eau à venir rendront ces investissements bien moins rentables d’ici peu… Sauf à envisager qu’elles utilisent de l’eau de salle recyclée et filtrée (puisque les gosses vont se baigner dedans).
3-La création de “revêtements à albédo élevé”
En gros : on peint le sol ou le toit en blanc. Problèmes : ça coûte un bras, le piéton prend toute la lumière dans la figure. Encore une connerie cornucopienne. Il fallait construire blanc AVANT !
4-La création de “revêtements drainants”
Un asphalte qui stocke l’eau de pluie pour lui permettre de s’évaporer avec la chaleur. Ce qui revient exactement au même résultat d’un arrosage des rues le soir, mais coûte 200 fois plus cher… et ne fonctionne plus en cas de sécheresse !
5-Les “matériaux à changement de phase”
Des trottoirs qui vont passer d’un état solide à liquide selon les températures. Complètement délirant !
En bref…
Vous l’avez compris : je privilégie les solutions douces, naturelles et low tech.
Je rejette les logiques proches de la géoingéniérie, où il est plus question de faire du pognon que de préserver l’environnement.
Si vous souhaitez aller plus loin sur ces questions d’adaptation des villes aux fortes chaleurs, vous pouvez vous pencher sur :
- les travaux de Guillaume Faburel sur la désurbanisation (je l’ai interviewé ici).
- les thèses autour de la “forme urbaine bio-climatique”. Une stratégie d’aménagement urbain qui favorise la circulation des vents et limite le piégeage de la canicule en ville. Par contre, c’est limité aux villes en projet/construction…